J’ai remarqué dans les premiers mois de mon apprentissage de l’ACP à quel point il a été difficile pour moi de me défaire du réflexe de penser que je savais mieux que la personne ce dont elle avait besoin pour grandir ou guérir de ses traumatismes. Je pensais savoir ce qu’elle avait besoin de comprendre et de faire pour aller mieux et ceci me poussait à juger son chemin et à vouloir la diriger. J’ai vu cette attitude dans beaucoup de mes collègues apprenties thérapeutes également. Et je l’ai vue chez la totalité des thérapeutes non ACP que j’ai consultées jusqu’à aujourd’hui. Elles m’ont toutes donné des conseils parfaitement bien intentionnés. Chez une en particulier je me sentais heurtée à chaque séance du fait qu’elle me coupait la parole pour parler longuement de ce qu’elle pensait des situations que je lui exposais sans jamais me donner le sentiment qu’elle comprenait ce que je vivais. Cela me faisait vraiment violence. Je me sentais jugée. Je sentais qu’elle avait une idée fixe sur moi. Et je ne ressortais pas de nos séances avec plus d’éléments pour gérer mes problèmes. Au fur et à mesure de la formation et des lectures de Rogers et Gendlin, j’ai appris à totalement laisser de côté l’idée même que je savais ce dont la personne avait besoin et en même temps mes jugements sont tombés. Je vois souvent dans mes entretiens le doute dans les yeux de mes clientes lorsqu’elles me livrent des aspects d’elles-mêmes qu’elles jugent négatifs, comme si elles attendaient ma réaction pour savoir si elles pouvaient continuer. Sentant que je reste totalement positive, elles continuent et peuvent ainsi s’explorer librement sans restriction. Je sens souvent leur soulagement lorsque je reformule un élément qu’elles ont hésité à livrer, sur le même ton que j’ai reformulé le reste. Je sens aussi souvent que ce regard positif inconditionnel s’exprime en moi par de la tendresse. Je me sens attendrie et émerveillée de découvrir pas à pas, en même temps que ma cliente, l’unicité de son chemin. Lorsque l’on suit ainsi avec attention le chemin de nombreuses personnes, il est impossible d’en tirer des conclusions stéréotypées. Dès que la personne est en contact avec son experiencing, on ne peut pas prévoir par où elle va passer et où elle va arriver. L’expérience de cela m’aide à m’asseoir dans une écoute attentive et ouverte à toute la personne, sans supposition sur ce qu’elle est ou ce dont elle a besoin. Je sais, pour en avoir été témoin tant de fois, qu’en se sentant totalement acceptée à chaque étape, elle empruntera un chemin unique et constructif que ni elle ni moi ne connaissons à l’avance. De plus, en ayant un regard inconditionnellement positif sur ma cliente, j’entends plus facilement ses forces que ses insuffisances. Je m’apprête alors à écouter et à attirer son attention sur les ressources qui apparaissent dans son partage.
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