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Devenons le Tout dans l'Instant Présent,

Conscientes de n'être qu'un fragment infime du temps.

Mélisa Rachel

Mon quotidien est un chemin de Conscience. Sur cette page, je partage avec vous quelques une des prises de conscience qu'il m'offre.

Ce monde est pourri... ou bien ?

16 Octobre 2024

Lundi, assise dans un café de Chambéry, j’ai fait un auto-focusing, en écrivant. Le voici.

 

Aujourd’hui j’ai goût à rien. Il pleut. Tout m’ennuie. Je voudrais prendre une douche chaude puis me glisser sous la couette et ne pas en sortir avant au moins demain matin. Différents éléments de mon organisation font que je ne choisis pas de faire ça là maintenant. Je choisis d’attendre dans un café de Chambéry que la propriétaire de la salle où je donne mes soirées soit disponible pour signer la convention de location et payer cette dernière. Après ça, je n’aurais plus qu’à conduire deux heures afin de passer la semaine avec mon amoureux. J’aimerais bien avoir la baguette magique qui me permettrait de passer directement à cette dernière étape, sans avoir à fournir aucun effort pour cela.

Il faut le dire aussi, c’est le deuxième jour de mes règles. J’ai un peu mal au ventre mais surtout je suis FA-TI-GUEE. De cette fatigue qui fait que quand j’essaye de lire j’ai oublié le début de la phrase une fois arrivée à la fin de celle-ci.

On a toujours le choix… de faire avec ce qu’on a. Si j’avais une baguette magique, en fait, je ne me propulserais pas jusqu’à ce soir, je me donnerais l’énergie et l’envie de faire tout ce qui serait utile que je fasse là aujourd’hui. Mais voilà, la réalité c’est que je n’ai ni l’énergie, ni l’envie, ni baguette magique. Ca j’ai pas le sentiment de le choisir, de pouvoir faire varier ces éléments. Je ne peux que décider ce que je fais avec. Et en même temps, là, la seule chose que j’arrive à décider bah c’est d’être là quoi. Pas franchement détendue. Pas franchement enthousiaste. Juste ok avec ça.

Parfois y’a pas mieux que cet instant un peu mou et gris. Et quand je suis ok avec ça, je me détends au max de ce qui est possible pour moi là maintenant. Voilà. C’est tout.

Et en fait si je reste encore un peu avec ce « juste être ok avec », je sens mon corps se détendre encore un peu plus à chaque seconde. Je peux pas encore dire que je kiffe le moment mais je me sens indéniablement moins tendue.

Et en même temps, maintenant je me mets à sentir des douleurs dans le dos. Comme si la dissolution des tensions de surface faisait apparaître les tensions plus profondes.

L’acceptation, c’est pas en une seconde, ça demande souvent un peu de temps. C’est un processus avec ses va-et-vient.

Je reste encore avec cet instant. Je suis soulée. L’endroit où je suis ne m’intéresse pas. J’ai aucune envie de parler aux gens. Tous les bruits m’incommodent. J’aimerais tellement du silence ! Je reste avec ça.

Je n’ai plus mal au dos.

Je sens un ras-le-bol profond faire surface. Je vois mes jugements. Sur moi. Tout ce dont je m’accuse chaque jour : j’en fais pas assez, j’aurais pas du dire ça, je suis pas foutue de réussir telle ou telle chose, je devrais avoir plus d’énergie, etc. Je reste avec ça.

Ça revient au départ. Je suis fatiguée. Rien ne m’intéresse. Tout et tout le monde me soule. Ah, deuxième couche de discours mental, vers les autres cette fois-ci : pfff ce monde est vraiment pourri, mais pourri de chez pourri. Les gens sont cons et je suis pas franchement mieux. Qu’est-ce qu’on s’emmerde, dans tous les sens du terme.

Quand je dis « ce monde est vraiment pourri » je sens quelque chose se détendre et s’ouvrir en moi. Ca m’indique qu’il y a là un élément important. C’est ça le plus important. Je reste avec. Ca grossit, envie d’hurler en sachant que personne n’entendra car personne en ce monde n’a d’oreilles pour qui je suis, pour ce que je veux dire. Qui écoute ? Personne n’écoute. Personne n’écoute. Il n’y a personne pour écouter. Personne ne veut m’écouter. Je parle dans le vide… Ca fait étrangement écho à un des grands thèmes de ma vie. Me sentir invisible… Inaudible. Ah oui, ça résonne bien. Je le reproche souvent à mes proches, à voix hautes ou seulement dans ma tête, je me sens rarement écoutée. Encore moins depuis que l’ACP m’a appris ce que veut dire "écouter". Et ça me heurte fort chaque fois que j’ai le sentiment de ne pas être entendue.

Alors qu’est-ce qui n’est pas entendu en moi ? Qu’est-ce qui crie et que je n’entends pas ? C’est quelque chose d’intime. Je vois un tissu de satin rose. C’est quelque chose que je connais si bien que je ne le vois plus. Des images de mon adolescence. Quelque chose de doux. Quelque chose d’évident, de criant, tellement là, tellement visible, de toutes. Ma douceur ? Nan, c’est pas tout à fait ça, pourtant ça y ressemble, mais le mot ne résonne pas. Gentillesse. Main tendue vers l’autre. C’était ça, je l’ai sentie. Puis tout à coup tout s’est brouillé et j’ai l’image d’un crâne avec le mot croque-mort. Interdiction d’être gentille. « Je ne mérite pas d’être gentille, ni belle, ni douce ». Gentille, belle et douce. Oui. Il manquait le mot "belle". C’est ça, je ne peux pas être tout ça à la fois. C’est trop attirant. C’est dangereux.

Quelque chose s’est totalement ouvert et détendu avec l’ajout du mot « belle ». Mais il ne fonctionne pas tout seul. C’est « gentille, belle et douce ». Et généreuse. Trop ouverte. Ca c’est vraiment dangereux. Les hommes ne me respecteront pas. Les femmes non plus. / Fin de l’auto-focusing.

J’ai pu aller jusque-là, puis l’heure de partir pour mon rdv est venue. Et je me suis levée détendue. La tension du début avait disparue. L’espace en moi était revenu, ce qui le contractait parti. J’ai continué un peu, en conduisant, à observer ce que ça faisait en moi. Ce « être gentille, belle et douce est dangereux » s’est confirmé et ce faisant un grand espace s’est ouvert en moi. J’aurais surement pu aller plus loin si j’avais eu le temps sur le moment. Mais laisser émerger cet élément, que quatre heures d’analyse de pourquoi je me sens déprimée aujourd’hui, ne m’aurait jamais permis d’identifier, a détendu mon système. Absolument rien n’avait changé à l’extérieur. Autoriser un élément dormant au fond de moi, informulé, à se montrer et se formuler à la lumière de ma conscience a fait s’évaporer la tension.

C’est cela le focusing. Ce qui nous agite est ce qui n’est pas reconnu pleinement. Et je ne le reconnais pas en cherchant, mais en ouvrant mon espace à ce qui est là. Puis, à un moment, quand je sens que j’ai laissé le fond de mon état présent m’apparaître, s’il ne se fait pas tout seul, j’effectue ce que j’appelle (c’est pas dans les étapes officielles du focusing) un retournement. Je retourne ce que je vois du monde, d’une situation, d’une personne, vers moi. Car tout ce qui me bloque à l’extérieur est le reflet d’un blocage intérieur. J’ai fait cette expérience des dizaines de fois. Alors, une fois vue pour ce qu’elle est réellement (mon problème et non celui du monde extérieur), une tension se relâche. Alors, si je veux et si j’ai le temps, je peux chercher les solutions, à partir d’un espace détendu et en restant en contact avec cet espace intérieur connecté à l’entièreté de qui je suis : matière et esprit, senti et réflexion, lumière et ombre. De cette globalité et en prêtant l’oreille à mon problème particulier présent, des solutions émergent, nouvelles, créatives, surprenantes.

Alors, voyons si je peux reprendre où je m’étais arrêtée. Pour aller jusqu’au bout, il s’agirait de ramener l’élément qui a fait « shifter » mon état intérieur au problème de départ. En restant connectée à ce qui émerge de moi, au-delà de toute réflexion, je pourrais demander en moi : quel est le lien entre ma déprime, ma vision du monde comme inintéressant et mon expérience adolescente qu’être gentille, belle et douce était dangereux, que cela m’amenait des souffrances car les gens se comportaient alors mal avec moi ? Je pose la question et j’attends. Je n’y réfléchis pas. J’écoute ce qui émerge de mon corps. La réponse m’apparaît alors, tout simplement, c’est me couper de ma gentillesse, ma beauté et ma douceur qui a aigrit mon monde intérieur. Ce n’est pas le monde qui est ainsi. C’est mon monde intérieur qui s’est coupé de sa source. Dans le mot « beauté » ici il y a pour moi l’idée de simplicité et de spontanéité. L’apparition de cet élément me donne la clé. Pour retrouver l’attrait du monde, je dois retrouver cette simplicité, cette spontanéité dans la gentillesse et la douceur que j’avais plus jeune. Je vois bien que ce n’est pas le monde qui ne me l’autorise pas. C’est ce que j’ai compris des relations humaines à un moment, qui m’a fait enfermer cela. Cette décision s’est faite sur une compréhension inconsciente et biaisée d’une partie de la réalité. Je vois à présent qu’il m’appartient totalement de changer ça. Je n’essaie pas de me persuader que ça m’appartient. Je le vois, en moi. Je vois comment j’ai interprété la réalité. Ce faisant, je reconnais que d’autres interprétations étaient possible. Le monde extérieur n’est pas responsable de l’interprétation que j’en ai faite à ce moment-là. Je prends le temps de rester avec ça. C’est la clé du focusing. Rester avec. Sans rien attendre de précis.

Quelque chose apparaît : j’ai envie de changer ça. J’ai envie de cesser de rendre le monde responsable des interprétations que j’en ai fait. Et j’ai envie de retrouver la simplicité et la spontanéité d’être gentille, belle et douce. J’ai l’impression que « cesser de rendre le monde responsable » est encore plus fort que « retrouver la simplicité et la spontanéité d’être gentille, belle et douce ». C’est très libérateur pour moi. Et logique. Je me suis beaucoup sentie victime. Dans cette morosité de lundi il y avait au fond beaucoup de victimisation. Ce « être gentille belle et douce » est important. Il signifie me reconnecter à la joie en moi, tout simplement. Et il va de paire avec la reconnaissance que le monde n’est pas contre moi, qu’il ne m’oblige à rien, qu’il ne m’empêche en rien de faire quoi que ce soit. Ces deux éléments sont liés. Ensemble, ils me font me sentir libre. Je sens comme un immense poids quitter mes épaules. Ce n’est pas le monde qui me rendait morose, c’est l’interprétation que j’en faisais et qui me coupait de la joie douce que je connais en réalité si bien en moi. Je peux l’autoriser à s’exprimer maintenant, car le monde extérieur ne me veut aucun mal. Je laisse le temps à mon corps de recevoir pleinement cette nouvelle information. Je reste avec ça.

Voilà un cycle complet de focusing. On arrive à une réécriture de la réalité intérieure. Et quand celle-ci change, elle transforme aussi la réalité extérieure. Les deux ne font qu’un.

Je me sens profondément apaisée. Je me sens plus proche de moi. Je ressens de la gratitude pour moi-même, de faire ce chemin. Je me sens « humbled » encore une fois par la puissance du vivant en moi, que le focusing me permet de contacter en conscience.

Et j’aimerais vous rappeler que je n’ai fait qu’une seule chose : rester avec ce qui est.

« Ce qui est » contient sa propre force de mouvement, de changement. Si je lui donne mon attention, il évolue de lui-même.

Détourner mon attention, "penser à autre chose" ne dissout pas la tension. Analyser les tenants et les aboutissants ne dissout pas la tension. Entretenir les pensées redondantes ne dissout pas la tension. Accuser les autres ne dissout pas la tension. Rester avec, lui prêter une oreille attentive sans à priori, non seulement la dissout mais entend sa sagesse et réorganise mon espace intérieur vers plus d'harmonie.

Qu’est-ce qui est en vous, là maintenant ?

Ma chère ado

14 Octobre 2024

Depuis plusieurs semaines, je me sens toujours en tension. Depuis quand exactement en fait ? Depuis que ma fille a été hospitalisée et que toute mon énergie a été mobilisée pour être là pour elle. Je trouve intéressant de noter que les premières choses que j’ai mises de côté, ce sont celles qui me font le plus de bien : écrire et danser. J’ai continué la paperasse, les mails, les « obligations », j’ai arraché des soirées et quelques autres moments pour des moments de qualité avec mon amoureux et mes amies. Mais je n’ai ni écrit ni dansé, tout en me demandant tous les jours « mais c’est quoi cette tension de fond qui ne me quitte pas ? ».

La réponse m’est venue là, en ce lundi matin, alors que j’ai passé tout mon dimanche à gérer les angoisses de ma fille au lieu de me déposer avec délice dans les bras de mon homme :  je ne fais pas ce que j’aime faire, ce qui me nourrit, me porte, m’inspire, m’enthousiasme. Au lieu de ça, je m’inquiète our ma fille et je me plie en quatre pour répondre à ce que j’imagine de ses besoins. Et là, ce matin, devant la terreur de ma chère progéniture – parce qu’elle est pas sûre d’avoir compris son exercice de SVT -  et donc de l’évidente inutilité de l’énergie déployée toute la journée de la veille, quelque chose en moi a tout à coup réalisé que faire passer mes besoins après ceux de ma fille pouvait ne servir à rien en fait. En plus de ça, je n’ai eu droit qu’à un visage fermé du lever jusqu’à ce que je la dépose à l’internat deux heures plus tard. Là, sous la pluie, regardant mon ado s’éloigner après m’avoir dit au revoir à cinquante mètres du lycée parce que trop la honte d’être vue avec sa mère quoi, j’ai compris : « Maman, occupe-toi de toi parce que de toute façon quoi que tu fasses je vais vivre ma vie d’ado, i.e. faire la gueule tout le week-end et rigoler avec les copines toute la semaine. »

C’est une exagération bien sûr. On a aussi passé des chouettes moments à jouer, rire et discuter ensemble au cours du week-end. Je le précise car je suis absolument contre les caricatures sur nos ados qui savent aussi être ado-rables ! Mais même avec mon ado-rable à moi, je suis bien obligée de valider quelques cases du cliché. Y compris d’ailleurs, du cliché de la mère beaucoup trop angoissée.

Parce que voilà, c’est pas si simple… Est-ce que je peux totalement lâcher ma grande fille de quinze ans, cesser de m’en faire pour elle et avoir confiance en elle pour se débrouiller un peu sans moi ? Et même, est-ce que ça va pas la détendre justement que j’arrête de m’en faire pour elle ? Je vais ignorer la maman angoissée en moi et faire ce pari cette semaine.

Voilà, ce matin j’ai mis de côté la paperasse, les autorisations de sorties pour l’internat, les chèques pour le conservatoire, les textos aux parents des copines qui sont loin pour les faire venir à la maison, l’organisation des vacances,… Tout ça attendra. Je fais grève de ma fonction de parent cette semaine. J’ai besoin d’être concentrée sur moi. Elle va survivre cinq jours sans moi et si ça se trouve, ça lui fera le plus grand bien !

Et je commence cette semaine consacrée à moi, par l’une des choses que je préfère faire dans la vie : écrire.

Et toi, que vas-tu faire pour toi cette semaine ?

Le robinet et le sens de la vie

Septembre 2024

(Un article qui fait écho à un autre un peu plus ancien : « Aime-toi, j’te dis ! ou la tyranie du développement personnel. » Disponible sur la même page (janvier 2024))

Mon métier est d’accompagner des personnes vers elles-mêmes. Pour atteindre ce qui se vit réellement à l’intérieur, il faut presque toujours prendre le temps de traverser les idées. C’est particulièrement vrai pour les personnes investies de ce que B. Lamboy appelle dans son merveilleux ouvrage Devenir qui je suis, « la culture psy ». Toutes ces idées qui pourraient constituer la bible du développement personnel et de la spiritualité au XXIe siècle. Je vais tenter une courte compilation de celles que j’entends le plus.

« Je dois aimer inconditionnellement (donc je reste avec un partenaire qui ne me fait pas me sentir aimée). »

« Je dois lâcher-prise et ne pas réagir (même quand je me sens humiliée quotidiennement par mon patron). »

« Je dois faire taire mon égo (quitte à mépriser mes besoins de reconnaissance, d’accomplissement, voire d’intégrité). »

« Comprendre d’où vient ma souffrance va me libérer (pourtant y’a un moment que j’ai compris et je souffre toujours autant). »

« La colère c’est mal (cachons-la sous une épaisse couche d’éducation « positive » et de CNV mal comprise). »

Et celle qui concentre d’après moi le plus de malentendus :

« Il faut vivre l’instant présent (donc surtout sourire en toute circonstance… non non je ne suis pas frustrée que tout le monde me raconte ses vacances incroyables au bout du monde alors que moi j’ai pas bougé de chez moi et j’ai fait que bosser! En plus, y'en a qui n'ont même pas à manger donc je vais quand même pas me plaindre... on sourit, on sourit, vive l’instant présent !) »

Je respecte chacune de ces idées, et surtout chaque personne qui a le courage de chercher et de trouver sur quoi s’appuyer pour avancer, grandir, guérir, évoluer. L’ACP, et la somme incommensurable de mes propres errances, m’a enseigné un profond respect pour chaque tentative de l’humain de trouver sa voie dans les méandres des émotions qui le dépassent. Tout en honorant cela, j’aimerais partager avec vous mon expérience.

J’ai vécu plusieurs fois ce que je peux appeler des chutes vertigineuses dans l’Amour. Je vais vous en raconter une. J’avais 28 ou 29 ans. J’étais enseignante et je me sentais en échec dans ce métier. Ma vie amoureuse n’était qu’une longue suite de déceptions amères. J’étais surendettée. Je vivais dans le 30m² de ma mère avec ma fille de 7 ans. Je me sentais la pire mère du monde et j’étais en conflit sans arrêt avec ma famille, mes amies, le père de ma fille, mes responsables hiérarchiques, mes collègues. J’étais tellement mal à tous les endroits de ma vie que tout me donnait le sentiment d’une humiliation intense et je sur-réagissais à la moindre parole, au moindre regard déplaisant.

Puis un soir j’ai pris un bain.

 

Là dans mon bain, j’ai laissé le poids de toutes mes années de difficultés financières, amoureuses, familiales, de solitude s’abattre sur moi. J’ai laissé l’épuisement de l’accumulation de toutes les frustrations être là. Ce n’était pas une décision. Je n’avais simplement plus la force de lutter. Alors une pensée m’est venue : « et si ça ne changeait jamais ? Si je passais toute ma vie à compter chaque euro et  à chercher l’âme sœur sans jamais le trouver ? »  Tout à coup, il m’a semblé beaucoup moins couteux d’accepter cette possibilité que d’espérer que les choses changent. Je n’avais plus l’énergie nécessaire à l’espoir. Alors, au lieu de vouloir si fort le changement ou de m’asséner continuellement que j’étais nulle et que je n’arrivais vraiment à rien, j’ai juste arrêté l’un et l’autre. Sans décision, juste parce que je n’avais plus la force de rien, mon mental s’est arrêté. L’épuisement m’a privée d’un seul coup de l’énergie de croire au changement et de l’énergie de maintenir  mon cycle mental  négatif.  J’ai pris conscience de toute l’énergie qu’il faut pour « rester positive » mais aussi pour rester négative !  Les deux pôles se nourrissent à la même source : la négation du présent. Quand le mental m’emporte ailleurs que dans ce qui est, que ce soit des projections apocalyptiques ou des espoirs lumineux, ça me coûte beaucoup.

Ce soir-là dans mon bain, mes pensées n’ont plus trouvé où se nourrir. Alors je me suis retrouvée là, sans plus aucune histoire à me raconter sur moi, les évènements et la vie. Sans histoires, il n’y avait plus que moi, là, dans la baignoire de ma mère. Juste moi, mon souffle, l’eau, la baignoire. Mon regard s’est posé sur le robinet, entre mes pieds. M’est alors apparu cette évidence : tout ce que je crois, tout ce que mon mental déverse d’idées et de croyances en moi, qu’elles soient « positives » ou « négatives », c’est comme ce robinet qui déverse de l’eau dans la baignoire. L’eau n’est pas la baignoire. Ce que je crois n’est pas la vie. La vie est neutre, comme la blancheur de la surface lisse du métal. Le sens est toujours inventé, toujours créé. Les évènements sont neutres. Le sens, c’est l’eau qui se déverse puis qui se vide.

Alors, sans plus aucune histoire à propos de moi, de la vie, sans plus aucun sens d’échec ou de réussite, je suis sortie du bain, je me suis séchée, j’ai mis mon pyjama et je suis allé me coucher pour m’endormir pleine du vide neutre de l’existence, pleine d'une immense quiétude.

Quand il n’y plus d’histoire sur la vie, sa nature se révèle. Quand j’arrête de vouloir absolument lui donner un sens, elle s’offre. Alors je vois : elle est amour. Tout le temps. Partout. Pour la totalité de tout ce qui est. C’est tout. Il n’y a rien à raconter et rien à croire. Quand je ne crois plus rien, tout à coup je sais. Je sais que rien n’est vrai. Et tout peut l’être pour moi si je le décide. Et ce que je décide n’a aucune importance au regard de la vie, qui déverse continuellement son flot d’amour sur moi, quoi que je fasse.

Alors j’aimerais vous confier ceci : m'abandonner à mon désespoir a été la plus belle chose qui me soit arrivé. L’exemple de la baignoire n’est qu’un parmi beaucoup d’autres. La dépression, si vous la laissez faire, anéantira votre système de valeurs illusoires. Vous chuterez et vous tomberez sur un sol infiniment plus solide et souple que vos anciennes croyances et pensées positives, moins couteux, plus soutenant, heureux, facile, où vous n’aurez plus à lutter. 

 

On peut aussi le dire à la Jim Carrey : « La dépression, c’est ton corps qui te dit « va te faire foutre, je ne veux plus être ce personnage. Je ne veux plus maintenir cet avatar que tu as créé pour le monde. C’est trop pour moi. »

 

A mon sens, si la psychologie classique se laissait toucher par la Conscience, elle enseignerait que la dépression est le système de guérison le plus puissant de notre organisme. Lutter contre elle c'est perdre une occasion unique de laisser se dissoudre toutes les croyances qui soutiennent notre moi construit sur notre éducation et nos blessures. C'est perdre l'occasion de nous dissoudre en l'amour. Lorsque j'ai cessé d'espérer, lorsque plus aucune de mes croyances n'a fonctionné, la Conscience a pris le relai. La Conscience, c’est l’Amour. L’Amour, c’est la Conscience.

Dans les mots de Christiane Singer, qui résonnent profondément avec mon expérience: « L’Amour n’est pas un sentiment, c’est la substance même de la création ».

Nos idées sur l’Amour inconditionnel, la Présence, le lâcher-prise, le plus souvent, au lieu de nous mener vers elles nous en éloigne, car elles nourrissent notre mental. Si nous nous y accrochons, l’essence de ces vérités nous échappe. Si nous les abandonnons en tant qu’idées, si nous n’y croyons plus, alors notre regard redevient innocent, alors l’Amour, la Présence et le lâcher-prise s’offrent soudainement à nous dans toute leur profondeur et leur simplissime complexité.

Lorsque vous vous sentez triste, abattue, désespérée, ouvrez votre cœur à vos émotions. Autorisez-vous à les ressentir pleinement. Lorsque vous êtes en colère, l’instant présent c’est que vous êtes en colère, accueillez-le. Mettez de côtés tout ce que vous croyez. Écartez les "je devrais aimer inconditionnellement et ne pas être jalouse", "je devrais lâcher-prise et être heureuse de ce que j'ai", "je devrais être reconnaissante", "je devrais vivre l'instant présent" [notez la contradiction inhérente à cette formule : « je devrais » signifie déjà que je rejette ce qui est, le présent !]. Oubliez totalement cela le temps d'être pleinement et inconditionnellement avec ce qui est vivant en vous à cet instant. TOUT ce qui est: la peur, l'angoisse, la terreur, la haine. Formulez-les clairement. Dites-vous : « cette vie c’est vraiment de la merde. Je ne vaux rien du tout. Je vais finir seule. », puis observez votre corps le ressentir pleinement. Laissez ces vérités momentanées vous envahir sous le regard témoin de votre conscience aimante. Imaginez les actes qu'ils vous feraient poser et jouissez-en, en imagination, sans vergogne, toujours sous les yeux du regard témoin. Une partie s'abandonne totalement, une autre observe, sans rien croire, juste en étant là. Alors vous sentez tout à coup votre cœur s'inonder de compassion pour ces parts de vous qui haïssent, cherchent à se venger, paniquent, sont égoïstes, froides, anéanties ou tout cela à la fois. Si vous pouvez les aimer aussi, alors vous vivrez l'amour inconditionnel. Et alors vous les verrez se transformer sous votre regard ébahi. Vous verrez et entendrez comme une résonnance puissante au fond de votre cœur vous intimant que ces parts ne sont qu'un autre visage de l'Amour. Vous saurez ce qu'elles recèlent de l'essence de votre vie, de la vie. Vous n'aurez plus besoin de croire. Vous saurez qu’une affirmation positive n’est pas plus aidante qu’une phrase dégradante si elle n’émane pas de la réalité de ce qui se vit en vous à cet instant. Vous saurez que ce qui vous paraît la plus grande évidence à un instant ne fonctionne plus l'instant d'après. Vous saurez que l'Amour, la Source, la Vie, la Grande Déesse, n'a aucune opinion, qu'il n'existe pas de "juste" ou "d'injuste" dans l'absolu car tout ce qui est, le plus beau et le plus laid à nos yeux limités d'humains, est infiniment aimé d’Elle à chaque instant. La vie n'est qu'amour, elle ne peut être autre chose. Elle accueille en son sein aimant les altruistes et les égoïstes, les adeptes du dépouillement et les plus grands matérialistes, les militants féministes et les violeurs.

Pour autant, elle ne nous demande pas de vivre avec des personnes dont les comportements nous font souffrir, sous prétexte de les "aimer inconditionnellement". Elles ne nous demandent pas de nous protéger d’elles non plus d'ailleurs. Elle nous laisse irrémédiablement, merveilleusement, désespérément libres. Elle nous aime de la même manière quoi que nous fassions. La seule chose que nos choix changent c'est avec quel degré d'aisance nous vivons nos journées.

Alors, au lieu de vous demander ce qui est « juste » comme s'il existait un espace dont le seul but est de juger et qui contiendrait toutes les lois du développement personnel et de la spiritualité d'aujourd'hui, plongez en vous, ressentez totalement, amusez-vous des stratégies intérieures qui cherchent à avoir raison, se défendre, ou écraser l’autre. Elles sont vous aussi, cajolez-les puis agissez à partir de la Conscience qui n'a pas de jugement et vous permet seulement de sentir vos préférences. Lorsque vous vous demandez "qu'est-ce qui est juste", vous déportez la réponse en dehors de vous (même si vous croyez interroger un espace en vous !). Demandez-vous plutôt "de quoi j'ai envie ?", "qu'est-ce qui me donne le plus de joie ?" Écoutez la réponse de votre corps. Puis expérimentez.   

La valeur d'une action pleine

Septembre 2024

Au début de l’été, lors du séminaire annuel de l’Institut de Focusing d’Europe Francophone, j’ai donné une conférence dansée. C’était une première. L’idée de me retrouver seule à m’exprimer et danser sous tous ces regards attentifs m’a valu quelques maux d’estomac les semaines précédentes. Mais je l’avais décidé. Je l’ai fait. L’intention était de présenter mon mémoire de fin de formation et donc de parler de l’ACP-focusing. Mais je voulais aussi danser pour ne pas seulement parler, mais surtout montrer l’ACP-focusing. Toutes deux se basent sur la confiance en ce qui naît, existe, se transforme dans nos mondes intérieurs et nous pousse irrémédiablement vers le meilleur de nous. La danse que je pratique depuis presque seize ans maintenant permet au mouvement de vie naturellement auto-guérisseur et porteur de croissance de circuler à nouveau… C’est la même chose.

Alors voilà, je voulais danser et parler et je l’ai fait.

Tout n’était pas écrit à la lettre, loin de là. J’avais un grand I, un grand II et un grand III avec chacun une citation associée de Rogers ou de Gendlin. Trois grandes notions, chacune incarnée dans une danse. Et j’avais la musique. Mais surtout j’avais ma détermination à Être Authentique. C’était elle ma sécurité. C’était elle mon fil rouge, mon focus, mon engagement avec moi-même, ma motivation. Je voulais montrer l’authenticité. Être, dans mes mots et dans chaque intonation de ma voix, chaque regard, chaque sourire et chaque geste, ce qui est. Ne rien ajouter, ne rien enlever. Dire quand j’ai peur, dire quand je tremble, dire ma joie et mes hésitations. Me mettre à nu, pour de vrai.

Le corps du texte n’était pas écrit et honnêtement, je ne sais plus vraiment ce que j’ai dit. Je sais seulement que mon intention s’est transformée en action. Je le sais parce que je l’ai ressenti. J’ai réussi à être authentique. J’ai osé. J’ai accompli exactement ce que je voulais accomplir. C’est ce que j’appelle une action pleine. J’ai eu une idée, une envie, une inspiration et je l’ai mise en œuvre. La forme était probablement emplie de « défauts ». Je n’ai probablement pas été claire sur certaines notions. J’ai probablement fait des phrases peu pertinentes. Peu importe. Car quand j’ai eu terminé, je me suis sentie emplie de fierté, de satisfaction, et par-dessus tout, de joie. La joie d’avoir accompli exactement – oui, je me répète, car ces deux mots sont importants – ce que je voulais. Accomplir: Mettre en acte concret une idée. Exactement: Sans aucune concession avec ma vision. Une vision émanant d’un désir réel.

C’est le troisième et dernier critère de l’action pleine : émaner d’un espace suffisamment conscient pour être au service du meilleur de Soi. Quelle différence entre un désir émanant d’un tel espace et un « faux désir », me direz-vous ? Eh bien, voici un exemple précis. Il y a deux ans, pendant plusieurs mois j’ai voulu, très fort, me faire tatouer. J’ai fait dessiner mon tatouage par une talentueuse tatouseuse. Il me convenait parfaitement. J’étais animée par quelque chose. Mais quand j’ai finalement pris le temps de vraiment sentir d’où venait ce désir, j’ai soudainement pris conscience qu’il émanait d’un endroit en besoin d’exister, d’être vue et que marquer ma peau à vie, fut-ce par une belle danseuse nue aux cheveux dans le vent, ne me faisait pas vibrer et venait même à l’encontre d’un profond instinct de conservation. Si je n’avais pas pris le temps, ou si je n’avais pas su comment soulever les premières couches de mon désir, j’aurais probablement agis non par authenticité avec ce que je suis mais à partir d’un besoin d’exister, et disons-le clairement, d’un effet de mode.

(M’)Offrir une conférence dansée émanait d’un désir bien plus profond, celui d’aider le plus possible de personnes à vivre authentiquement, en accord avec ce qu’elles sont vraiment. Pour cela, le meilleur outil n’était pas de parler d’authenticité, mais de montrer l’authenticité, d’être ma vérité à chaque seconde.

Je l’ai fait. J’en suis ressortie profondément joyeuse.

C’est alors que l’immense cadeau est arrivé : les retours des personnes présentes. « Touchant. » « Courageux. » « Inspirant. » sont les trois mots qui sont revenus de manière étonnement constante. J’avais déjà vu, pendant la conférence, des regards brillants, touchés. Après, j’ai reçu ce que j’ai ressenti comme un raz-de-marée d’amour. J’étais inondée de témoignages qui me disaient : « ça a marché ». Les gens me parlaient d’authenticité et de comment me voir les a inspiré à être authentiques.  Non seulement je me suis fait plaisir mais en plus cela a servi à d’autres humains. Je le souhaitais bien sûr. Et j’ai été exaucée au-delà de mes espérances. Je n’aurais pas pu prévoir les réactions, les mots, les regards si profondément authentiques et touchés qui se sont offerts à mon cœur déjà débordant de gratitude.

Puis, comme un énorme sucre d’orge planté dans la cerise sur le gâteau, le lendemain un homme est venu à mon atelier de danse consciente, témoignant à quel point il souffrait de se sentir coincé dans son corps et aimerait « faire comme [moi] », être à l’aise dans le mouvement et oser se montrer. Je l’ai accompagné dans un beau processus tout au long de l’atelier. Deux jours plus tard, lors de la dernière soirée du séminaire, il a étonné tout le monde avec un joli spectacle de clown, à la fois drôle et touchant, à son image. Il avait osé.

Alors voilà ce que je voulais partager avec vous : le pouvoir d’une action pleine. Pleine de ce que vous êtes vraiment. Pleine de ce qui vous anime, non pas dans la surface de vos blessures, mais dans les profondeurs de votre Être. Ces actions là vous propulserons bien plus loin que vous ne l’imaginez et elles éclaireront l’espace autour de vous, pénétrant les êtres qui s’y trouvent d’une manière qui vous touchera et vous propulsera à son tour vers votre prochaine action pleine. Ce cercle vertueux, c’est simplement la vie, lorsque vous apprenez à sentir avec précision les différentes couches qui vous constituent.

Alors bien sûr, j’ai envie d’offrir à nouveau une conférence dansée. Elle sera différente. L’intention sera la même : offrir l’authenticité de l’instant à travers mes mots et mes danses. Et comme Isadora Duncan lorsqu’elle a ouvert les cœurs et les esprits au mouvement libre, libéré des carcans de la danse classique, j’aimerais le faire dans des espaces privés, chez vous, chez vos amies. J’aimerais que cette graine d’authenticité dont j’entends la quête chez tellement d’entre nous, germe au sein du terreau fertile d’espaces intimes, habités, d’espaces de vie. Alors si vous sentez l’élan d’accueillir l’authenticité et quelques personnes s’en laissant nourrir, contactez-moi. L’organisation – simple – de cet espace de partage pourrait être votre prochaine action pleine.

Comment kiffer pleinement chaque instant ?

Août 2024

Pour la deuxième fois de mon existence, j’ai passé dix jours en van en itinérance. La première fois c’était entre amies et avec ma fille. Cette fois-ci c’était à deux, en amoureuses. Et alors que tout me paraissait extraordinaire – les paysages, la tendresse, la marche, la connexion avec la nature, le sexe – une question n’a pas cessé de me tarauder pendant ces dix jours : Comment kiffer vraiment ? Suis-je vraiment en train de tirer le maximum de chacun de ces instants ?

 

Extraordinaire… C’est le mot ! Être en mouvement chaque jour, ensemble. Communier avec la nature. Être surprise par la beauté de lieux magnifiques sans cesse renouvelés. Donner et recevoir de l’amour. Me doucher dans la forêt. Savourer l’incongruité de moi et de mon rasoir au milieu de la mousse et de la végétation qui se moquent bien de savoir si je pique. Me baigner nue dans des lacs translucides en pleine montagne pendant que mon amoureux fait la sieste. C’était si bon. Et pourtant…

Il y a eu des petites tensions en moi. Des difficultés communicationnelles à surmonter. Deux jours de pluie qui ont suffi à nous faire déplorer l’instant présent et en réclamer un autre, ensoleillé. Des choix professionnels à assumer. Des guêpes... C’était des petites tensions, rien de grave, mais je les ai bien senties quand même. Et même si à aucun moment je n’ai souhaité être ailleurs que là où j’étais, je me suis demandé pourquoi ce voyage qui correspondait en tous points à ce que j’aime ne suffisait pas à annuler l’existence même des petits cailloux dans ma chaussure. Pourquoi être comblée sur tant de plans à la fois ne me donnait pas le pouvoir de transformer instantanément les cailloux en doux cotons délicatement accueillis par ma peau ravie ?

Parce que ce que je suis est avant tout à l’intérieur. J’ai beau être reliée et même en osmose avec l’extérieur, celui-ci ne me pénètre que par l’intermédiaire de ce qui existe au préalable en moi. Ni les montagnes Autrichiennes, ni les lacs Allemands, ni même les gestes et les mots parfaits de mon amoureux ne peuvent en une seconde faire cesser d’exister les tristesses, colères et apathies qui m’habitent.

Ma façon d’être au monde me poursuit où que j’aille. Ma façon d’être à moi-même ne change qu’en surface et momentanément lorsque j’ai le souffle coupé par un paysage ou un baiser. Au final il n’y que moi, face à moi, qui puisse changer ce que je porte.

L’extérieur m’aide bien sûr, me soutient et je m’appuie dessus, mais sans une décision de ma part, et les actes qui vont avec, ils ne suffiront pas. C'est à moi de décider comment j’utilise ces cadeaux de la vie pour évoluer, ou pas. Seuls, ils ne seront pas déterminants, ma décision le sera. Et j’ai décidé depuis un certain temps déjà, de m’appuyer sur tous les plaisirs de l’existence pour renaître à moi-même et transformer les cailloux et les pierres qui m’habitent encore en marches, belles et délicates, non pas pour monter vers un fantasme de moi libérée et libératrice du monde, mais pour descendre vers la simplicité de l’instant.

Cet instant qui, dépouillé, contient Tout.

Cet instant que je ne peux goûter qu'à travers l'expérience unique de qui je suis ici et maintenant.

Je sais le faire, je connais le bouton, celui qui fait cesser ma tête et me relie instantanément à mon expérience organismique. Je l’ai cherché de nombreuses années. Maintenant je sais l’actionner. Mais dès que je n’y prend pas garde, ma tête reprend les rennes. Alors je dois, pour l’instant, sans cesse rappuyer dessus, revenir dans mon expérience présente, dans mon corps.

C’est dans le sexe que je le fais le mieux, parce que c’est là que mon corps est le plus impliqué. Quand, en faisant l’amour, je sens que les sensations sont moindres, je sais que ma tête à repris le dessus. Je rappuie sur le bouton. Alors, de grossières et habituelles, les sensations deviennent subtiles, nombreuses, différentes, changeantes, surprenantes, intenses. Il en est ainsi de chaque instant. A la seconde où ma conscience se déplace de ma tête à l’entièreté de mon expérience présente, celle-ci ne pouvant qu'être vécue dans mon corps, tout ce qui m’est présenté devient riche et complexe.

Ces petits villages que je traverse ne sont plus seulement charmants, ils sont chauds, accueillants, drôles, laids, inconvenants, et tant d’autres choses encore. La sensation globale et unique se découpe tout à coup en une multitude de sensations, plus fortes, toutes différentes, parfois contradictoires qui finalement me remplissent entièrement et me reflètent mon propre assemblage unique de couleurs disparates.

 

Être présente à chaque instant, ce n’est pas, comme je l’ai cru longtemps, me baigner dans une sensation fabuleuse unique et éternelle. C’est au contraire, me livrer entière à toutes les sensations de l’existence, celles qui viennent du dehors et celles qui viennent du dedans, avec tout ce que je suis, qui change aussi à chaque instant.

 

Une vie entière, une expérience entière, une relation entière sera toujours faite de toutes les couleurs. C’est les englober toutes, intérieures et extérieures, belles et laides, faciles et difficiles, qui fait exister cette présence tant recherchée, en paix avec ce qui est, ici et maintenant.

Le délice d'Être Soi

Août 2024

Je vis un été magnifique. Un séminaire d’abord. Six jours dans un très beau lieu très confortable à animer des groupes et des ateliers ACP-FOCUSING et à offrir ce que j’ai de plus beau, mon authenticité. Une conférence dansée, puis des moments de communion dans la fête, la joie, le rire où chacune jouit de la pleine liberté d’être Soi, au milieu des autres.


Je ne pouvais pas payer ce séminaire. Mais j’y tenais absolument. La vie m’a amené la possibilité de le payer en exploitant mes principales compétences : le focusing, la danse consciente, l’anglais. Je traduis un manuel sur le focusing en mouvement pour l’institut de formation.


Après le séminaire j’ai retrouvé ma fille pour honorer l’invitation de ma tante au festival d’Avignon. Je n’avais pas pris le temps de réserver les spectacles, et je me demandais bien comment j’allais les payer. J’me disais qu’on n’en ferait pas beaucoup et que c’était pas grave. Puis ma tante nous a obtenu des places de spectacles gratuites. On en a choisi cinq, parmi un large panel. Puis encore, juste la veille, un ami qui devait faire un des spectacles très prisés du festival change ses plans et nous offre ses places.


S’ensuit quelques jours dans l’Aude… qui ne nous coûtent que le trajet car nous sommes sur un site de home exchange qui nous permet d’être très bien logées gratuitement, et ce sont les sorties nature qui nous intéressent : randos, cascades, baignades… Entre autre, un pur moment de bonheur à marcher sur le mont Bugarach et à nager et rigoler sous la « cascade des Mathieux » dans un cadre splendide.


Et aussi, au milieu de tout cela, de joyeux moments en amoureux et voyages en van… heureux ensemble sous le soleil, les étoiles ou l’orage, à courir trempées jusqu’au van, riant comme des gosses et se réchauffant de tendresse et de désir.

Et aussi de l'amitié, beaucoup, et du temps pour en profiter. ​Des jeux, des fous rires, des baignades, des confidences, du vélo, de la complicité.


Vous voyez où je veux en venir ?


Après de longues années à me demander à quoi pouvait bien servir mon existence et à ne voir que ce que je n’avais pas, je touche enfin en moi le délice d’exister. C’est l’ACP-focusing qui a terminé de faire le ménage dans mon cœur pour me laisser enfin respirer, savourer, aimer la vie…. Aimer MA vie et cesser de fantasmer celle des autres.


Tout n’est pas parfait. Au séminaire je me suis fait hurler dessus par le responsable du lieu totalement hystérique. Au festival, je me suis sentie révoltée par le sexisme de certaines pièces. En rando dans ces paysages magnifiques, je sursaute au moindre bruit dans les broussailles, terrorisée à l’idée de rencontrer un serpent. Dans ma relation amoureuse, je me sens rattrapée régulièrement par des peurs du passé.


Tout ce qui fait que les choses ne sont pas parfaites ne fait que souligner ce qui est bon, ce qui me touche, me nourrit et relâche les tensions archaïques en moi, celles qui m’indiquent que je ne devrais jouir de mon existence que cinq semaines par an, que c’est mal d'en vouloir plus, que je devrais faire un travail qui m’ennuie et me détruit car c’est ça la vie.


Ces tensions de fond, nous les portons toutes car la conscience collective nage encore dans les croyances d’un autre temps. Il faut souffrir pour mériter un petit peu de bonheur. Il faut en baver. Et aussi, sans argent rien n’est possible. C’est faux bien sûr, mais si profondément ancré en nous qu’il nous faut œuvrer avec conscience pour nettoyer notre être de ces limitations. Car elles ne rendent service à personne. Combien de frustrations quotidiennes déportons-nous sur nos proches et moins proches ? Qu’apportez-vous aux autres quand vous manquez d’amour pour vous, de sommeil, de plaisir ? Quelle est la qualité de vos interactions quand vous vous sentez vides, frustrées, fatiguées ? Et au contraire, comment vous sentez-vous en présence d’une personne heureuse, sereine en elle-même et qui prend soin de ses besoins sans vous les faire porter ?


Nous n’avons pas à mériter notre vie. Nous sommes vivantes et ce simple fait nous garantit le droit de jouir sans condition.


Et si vous vous leviez chaque matin persuadée que vous avez tous les droits de jouir pleinement de votre journée ? Si vous vous redonniez le droit, et même le devoir, de prendre soin de vous avant tout ? Si vous pouviez, comme cela m’arrive en ce moment même, vous laisser parcourir par l’absolu délice d’être vous, pour rien, juste comme ça, parce que vous vous ressentez pleinement ?


Oui c’est possible. C’est notre état naturel. Je le vis. Vous pouvez le vivre aussi.


Un de mes vœux les plus chers est de vous aider à toucher le délice d’être vous.

Alors, c'est quoi l'ACP-focusing ?

Juin 2024

" Comment on fait pour aller bien bordel, genre vraiment vraiment bien ?! Parce que bon, y'a un paquet d'années que j'essaye des trucs et pffff... ça bouge pas des masses ! Moi j'aimerais bien me lever chaque matin avec le sourire, développer mes talents, me sentir aimée, kiffer la vie quoi !

Et puis d'abord, c'est quoi l'ACP-focusing ? "

C'est le retour à Soi et à notre corps pleinement ressenti !

Et pour en savoir plus, je vous offre mon mémoire de fin de formation dans lequel j'ai développé la question... Et la réponse surtout !

En quoi le retour au corps pleinement ressenti est la réponse aux problèmes individuels et collectifs de ce monde ? La problématique est posée... Et elle n'est pas petite ! C'est que L'ACP-FOCUSING est aussi simple que puissante. Oui, une cinquantaine de pages plus tard, vous aurez appris ce que "revenir à vous" signifie et ce que cela vous apporte... Et j'espère que vous aurez envie d'expérimenter !

Je m'appuie bien sûr sur les écrits de Carl Rogers et Eugène Gendlin, et ce que j'en ai "expériencé" grâce aux deux années passées à l'Institut de Focusing d'Europe Francophone. J'ai vraiment hâte de savoir ce que ces quelques pages ont ouvert et fait résonner en vous ! Svp, partagez-le avec moi ! Je me suis régalé à écrire ces pages, j'espère que vous vous régalerez à les lire.

Car, comme nous le disaient Roro et Gégé, non nous ne sommes pas des êtres mauvais, pêcheurs par nature ayant désespérément besoin d'un sauveur spirituel ou politique. Il n'y a rien à trouver à l'extérieur tant que le lien intérieur n'est pas rétabli. Mais y'a quoi dedans ? De sombres recoins dont nous devrions avoir peur ? Des pulsions à réprimer sous peine de nous entre-tuer ? Parce que si on n'est pas cadrée, comme on cadre nos enfants, alors la guerre et le désespoir régneront ?... Mais c'est pas déjà un peu le cas ? Tant de ce qui a été dit sur la nature humaine nous a menées au pied du mur, individuellement et collectivement, acculées devant l'évidence : ça a pas l'air de fonctionner d'appliquer les lois extérieures, que ce soit celles de l'Eglise, de la psychanalyse ou des gouvernements.

Rogers et Gendlin, à force d'observer et de vérifier scientifiquement leurs théories ont découvert que quand nous rétablissons le contact avec ce que nous sommes vraiment, le beau et le laid, la joie et la haine, accueillant avec le même regard positif inconditionnel tout ce que nous sentons, un équilibre naturel s'établit.... Vers le bien. A contre-courant de toute la psychologie avant eux, ces deux hommes au cœur et à l'esprit grands ouverts nous rendent ainsi le chemin vers nous-mêmes, rien que ça ! Oui oui !

J'aimerais vous expliquer comment exactement. Ce mémoire est un bon début pour cela... Et peut-être qu'il vous donnera l'envie de chercher plus loin, et d'expérimenter en séance individuelle avec moi ou en stage.

Car il n'y a rien que je ne souhaite plus que nous soyons de plus en plus à être proches de nous-mêmes, vraiment proches. Car alors nous saurons être proches, vraiment proches les unes des autres au lieu de vivre seulement les unes à côté des autres. L'Approche Centrée sur la Personne et le Focusing sont concrètes, simples et puissantes... Ce qui ne signifie pas que leur application est facile car elle demande tout un renversement de perception.

Alors, pour faire un premier pas dans l'aventure, c'est ici:

« C’est aux femmes de ramener les hommes vers leur cœur »… Ah bon ?

Octobre 2023

Parfois dans mes intériorisations, des êtres viennent m’enseigner. C’est arrivé il y a quelques jours. J’étais en méditation sur mon besoin de solitude. Un être profondément bienveillant est alors apparu. Il m’a prise par la main avec beaucoup de douceur. J’ai senti son intention dans mon cœur. En mots, cela aurait donné cela : « vient voir, il y a quelque chose que tu ne comprends pas encore. Je vais te montrer. Viens voir la souffrance des hommes ». Et il m’a emmené au cœur de la souffrance particulière des hommes. J’ai résisté. Quelque chose en moi refusait catégoriquement d’admettre que les hommes puissent souffrir. Consciemment pourtant, je le savais depuis longtemps. Mais intérieurement je le refusais. Le Grand Être Bleu (c’est comme ça que je l’appelle car je le visualisais grand et entièrement bleu), avec toute sa douceur, m’a amenée à laisser tomber mes défenses et à accepter de plonger dans la souffrance des hommes.

Il m’a montré deux choses : la guerre et la psychiatrie. Des hommes devenus fous à force d’être forcé de tuer et de ne pas avoir le droit de ressentir. Il m’a montré que ces deux éléments sont propres à l’inconscient collectif masculin. Ils n’existent pas dans celui des femmes. Le Grand Être Bleu m’a montré que dans toute la domination des hommes sur les femmes depuis des millénaires, ce sont eux qui ont finalement vécu le pire : la coupure totale d’avec leur cœur, d’avec l’Amour. Nous n’avons pas eu le droit de nous réaliser en tant qu’êtres indépendants, c’est encore à bien des endroits le cas aujourd’hui. Nous, les femmes, avons été bafouées dans notre intégrité de milliers de façons différentes. Mais nous avons eu le droit de ressentir, nous n’avons pas été forcée de tuer et – c’est le dernier élément et peut-être le plus important – nous avons eu la maternité. Ma vision me montrait une mère avec son enfant et le lien d’amour qui a été sauvegardé à cet endroit pour les femmes. Par la maternité nous avons pu garder un lien à l’Amour et à nous-mêmes, alors que les hommes non. C’est pour cela que c’est à nous aujourd’hui de les guider à nouveau vers leur cœur.

Avant cet enseignement par le Grand Être Bleu, cette phrase que j’entendais à beaucoup d’endroits dans différentes versions mais avec toujours la même idée : « C’est aux femmes de guider les hommes vers eux-mêmes, vers leur cœur, vers la Conscience, vers l’amour, vers le sexe éveillé » ne me convenait pas. La féministe en moi répondait « Et pourquoi ce serait encore à nous de faire le boulot, on n’en fait déjà pas assez ?! Ils vont bien se responsabiliser un peu, on va pas encore les prendre par la main ». Hé bien si. Car nous avons un avantage, que nous avons toujours eu, et qui ne va pas avec le discours féministe. Il n’en est pas moins indéniable. Le sort des femmes à travers le monde a été et est toujours à plein d’endroits -physiques et psychologiques - terrible. Mais le pire de tout est de ne pas pouvoir aimer, ne pas pouvoir ressentir, ne pas pouvoir choyer, d’être forcé à tuer. C’est cela que portent les hommes. Alors il est juste qu’ils passent par nous pour retrouver leur cœur.

Cela ne signifie pas que nous devions les « éduquer », les abreuver de la bonne parole, de ce que nous pensons avoir compris. C’est en incarnant la Conscience qui mène à l’accueil et l’acceptation de toutes les parts de nous et en interagissant avec eux à partir de cette présence ouverte à nous-même et à l’autre que nous les aideront à ouvrir cette porte en eux. Il s’agit d’Être l’amour, non de le prêcher. Si nous l’incarnons pleinement, par nous-mêmes, parce que nous le pouvons plus facilement, nous deviendrons les canaux énergétiques auprès desquels les hommes pourront à nouveau se relier à leur cœur, les sources où ils pourront s’abreuver. Nous leur faciliterons la tâche, parce qu’elle est moins difficile pour nous qui ne portons pas l’inconscient collectif masculin.

Alors oui, c’est vrai, c’est à nous, les femmes, de faire le chemin d’abord vers notre cœur et vers la Conscience, afin qu’à force de vibrer l’Amour, et d’offrir cette vibration, l’esprit et le cœur des hommes se ressoudent.

Alors réunifiés ils magnifieront leur nature véritable. Ils redeviendront des pourvoyeurs de biens et d’Amour, des protecteurs. Dans ma vision j’ai vu cet homme réunifié à lui-même revenir au près de la mère et de l’enfant les entourer de ses bras aussi doux que solides. Et je voyais autour de lui des centaines de fruits, symboles de la nourriture tangible, physique qu’il apportait.

Et enfin, ma vision comportait une dernière partie, sur l’équilibre des polarités entre l’homme et la femme. Je me voyais dans une sorte de grande maison avec toute une partie habitée et une autre qu’il fallait laisser vide. C’était comme une grande salle de danse. Un mouvement en moi me poussait à occuper cet espace. C’était un mouvement enfantin, celui d’une petite fille qui veut s’imposer partout. Mais le Grand Être Bleu me disait, toujours avec une douceur et un amour infini : « non, tu dois laisser cet espace vide. C’est celui que prendra l’homme lorsqu’il arrivera. » et il me tendait un grand miroir que je devais diriger vers la grande salle. « Cet espace permettra deux choses : 1. L’homme qui souhaitera entrer dans ta vie aura un endroit où apporter ses fruits, un endroit où il se sentira utile et où il pourra voir son utilité dans le miroir que tu lui tends. 2. T’entraîner à laisser cet espace vide te permettra à toi, lorsqu’il sera occupé par un homme, de ne pas empiéter sur ce qu’il souhaite apporter dans la relation. Cela t’évitera l’erreur de tant de femmes qui se laissent emporter par leur tendance au contrôle de l’autre. Tu pourras ainsi le laisser libre de ses initiatives pour lui-même et pour vous. Ton travail à toi sera d’accueillir cela et de t’en laisser nourrir. » A ce moment de la vision, je me suis sentie emplie de la tête aux pieds de ce que j’appelle la fréquence du Recevoir.

Laisser sa coupe ouverte pour recevoir sans autre action qu’accueillir est bien plus difficile qu’on ne pourrait le penser. La plupart d’entre nous ont beaucoup de difficulté à le faire. Il est bien plus facile d’agir, de donner, de produire, que de recevoir. Cette fréquence est intrinsèquement féminine. Et ce n’est pas de la passivité. La passivité est fermée et aveugle. La Réception est grande ouverte avec tous ses sens éveillés. C’est l’essence de la féminité.

Pouvoir

Mars 2024

J’ai entrepris il y a quelques semaines, avec une coach, un travail sur mes valeurs profondes, le but étant d’aligner mon activité professionnelle sur celles-ci.

Ma coach m’a reflété quelque chose qui me revient souvent de l’extérieur, une vision de moi comme « courageuse ».

En moi ce n’est pas ce mot qui résonnait le plus. C’était le mot POUVOIR. Le pouvoir sur soi. Je suis déterminée à avoir du pouvoir sur moi-même… D’autant plus que j’en ai tant manqué.

C’est quoi manquer de pouvoir sur soi ? C’est se laisser agir par nos blessures et ne rien faire d’efficace pour s’en libérer. Quand je suis agie par ma blessure d’abandon par exemple, je ne décide plus de ce que je fais et dis. Je me vois agir en sachant que ce n’est pas pour le meilleur mais je ne peux tout simplement pas faire autrement. C’est plus fort que moi. La blessure est trop forte.

Mais ce n’est pas une fatalité. A force de plonger en moi et d’accueillir tout ce qui s’y passe en conscience, beaucoup de choses ont bougé. Certaines situations qui me faisaient perdre le contrôle jadis, ne m’éveillent plus aucun malaise aujourd’hui. Et comme la valeur pouvoir est essentielle pour moi, j’avance chaque jour un peu plus vers une vie qui me ressemble vraiment.

Simplement pour nous inviter à observer nos petites et grandes lâchetés du quotidien. Quand au lieu d’avoir le pouvoir sur nous-mêmes, nous nous laissons agir année après année par nos blessures et la facilité de ne pas nous voir dans le miroir que nous tend le monde.

Car, en effet, il faut du courage pour regarder en face nos failles, et nos blessures. Et c’est la seule façon de récupérer le pouvoir sur notre vie.

Ma responsabilité

Février 2024

Je suis en train de terminer ma formation de thérapeute ACP-Focusing. Bien que les outils d’accompagnement thérapeutique me soient parfaitement transmis à travers une pédagogie excellente, il y a un certain nombre d’autres éléments qui me dérangent profondément dans cette formation.

 

Voici pour les deux points principaux :

D’abord, le contrôle des acquis est aléatoire. Chaque membre peut passer en deuxième année sans avoir validé la première, un membre peut même intégrer la deuxième année sans avoir fait la première, en fait n’importe qui peut arriver à n’importe quel moment, manquer des modules, partir, revenir. Et lors de la dernière session de formation, nous avons accueilli une personne qui venait découvrir le focusing. Elle a passé deux jours avec nous. Tout cela mit bout à bout a pour conséquence, à mes yeux, que nous en sommes encore, dans les échanges en grand groupe, aux questions de bases, les mêmes qu’il y a un an. Celleux qui ont le moins acquis les principes de bases sont naturellement celleux qui posent le plus de questions et donc les temps en groupe sont presqu’exclusivement réservés aux notions de bases, encore et encore. De mon côté, je me suis énormément investie, j’ai rendu tous les travaux en temps et en heure, validé tous mes comptes-rendus d’entretien, raté aucun module, fait toutes les lectures et pratiqué énormément entre chaque session. Du coup, je passe maintenant beaucoup de temps à attendre et à m’ennuyer au sein du groupe. Je continue à apprendre énormément dans les pratiques à deux ou trois mais les temps en grands groupes (ils sont quand même nombreux), sont devenus inintéressants pour moi. Alors je reste là, à attendre, à m’ennuyer, et à me tendre à l’intérieur. Je ne me sens pas à ma place, j’ai le plexus solaire qui chauffe. Chaque nouvelle question me fait pousser un grand soupire intérieur et ajoute encore à ma tension. Je dois faire taire tout ce qui en moi est prêt à apprendre plus, à aller plus loin, à m’ouvrir de nouveaux espaces intérieurs.

Ensuite, la formation a lieu dans une auberge de jeunesse accueillant entre autres des réfugiés. Il y a une grande télé dans le couloir, à côté de la machine à café. Le plus souvent elle marche à fond. L’année dernière on était dans la grande salle qui donne directement sur le couloir, on entendait donc la télé pendant les temps de formation. Maintenant on ne l’entend plus de la salle où on pratique. Il y a eu une session où un mec venait nous brancher à chaque pause en mode « salut les filles, comment elles vont les demoiselles », et n’était pas content quand on ne lui répondait pas. Il y a eu deux fois de la bagarre dans l’auberge, une fois devant les vitres de notre salle de travail, une fois au réfectoire. Les salles ne sont pas nettoyées après le premier jour de formation donc au troisième jour le sol est sale, et comme on partage souvent un apéro le vendredi soir (deuxième jour), le lendemain, les petites poubelles de la salle débordent et les bouteilles vident de la veille sont posées à côté, et on travaille là, à côté des ordures et dans la poussière. Bref. Ce lieu n’est vraiment pas accueillant, ni confortable, c’est en pleine ville, il n’y a aucun lieu de ressourcement autour. Le mois dernier nous sommes deux à être parties avant la fin, ne supportant plus le manque de confort, de beauté, de propreté du lieu. Réponse de la formatrice quand on lui a annoncé qu’on ne ferait pas la dernière demi-journée : « de toute façon, il y en a toujours qui ne sont pas contents » et « c’est intéressant d’observer comment on peut être bien dans tous les endroits ou pas »…

 

Après la dernière session, j’ai donc passé mon temps à ressasser tout ce qui n’allait pas dans cette formation, à me dire que je n’y remettrai plus les pieds, malgré tout ce que j’y apprend dans les pratiques à deux. J’ai tourné en boucle dans ma tête pendant dix jours en mode : « Ce lieu est totalement révélateur d’un manque  de respect pour les étudiants. Il n’y a pas de considération pour nous » et « Ce nivellement par le bas, j’en peux plus. C’est totalement absurde ce système qui laisse rentrer tout le monde n’importe quand, sans aucune structure. Ca devrait pas être comme ça ».

Ces boucles mentales ont fait leur show dans ma petite tête pendant dix jours puis quelque chose s’est passé… L’énergie de reproche s’est épuisée et a fini par laisser la place à : « Bon, je dis tout le temps que je créé ma propre réalité, c’est moi qui ai atterri là, personne ne m’a forcée à me retrouver ici, j’y suis arrivée toute seule comme une grande. Je ne me suis pas amenée dans une formation où les acquis sont vérifiés au sein d’un cadre qui garantit l’avancée du groupe et d’un lieu ressourçant où je ressens l’harmonie autour de moi. Alors pourquoi ? ».

Et là, tout à coup, j’ai vu : La valeur que je ne me donne pas. Ce lieu inconfortable et disharmonieux, c’est l’exact reflet de la valeur que je me donne. J’ai vu ce qui en moi croyait ne pas mériter mieux. Et il y avait un autre élément : Je crois encore qu’il faut souffrir pour grandir, que l’éveil de conscience ne peut pas se faire dans la beauté et l’harmonie, il faut du chaos.

Puis je me suis dit : Puisque ce groupe ne me permet pas d’évoluer à mon niveau, qu’est-ce qui en moi ne me permet pas d’évoluer à mon niveau ? J’ai voulu connaître la vraie réponse à cette question. Je n’ai pas « réfléchi », j’ai laissé venir, en auto-focusing, j’ai fait le chemin. Et cela m’est apparu très clairement. Je ne me valide pas moi-même tout le chemin de désidentification que j’ai effectué. Je ne me valide pas que j’ai entrepris ce chemin à l’âge de vingt ans (après avoir épuisé, depuis l’âge de douze ans toute la littérature psy et développement personnel que j’ai pu trouver), que j’ai cherché, à partir de cet âge, le bouton « off » de mon mental pour entendre les courants profonds qui me traversent, pour devenir consciente de mes croyances profondes, très souvent l’exacte inverse de ce que je crois consciemment. Je ne me valide pas que j’ai vécu, encore et encore et encore, des expériences d’éveil où je me suis sentie transpercée par l’Amour, de plein de manière différentes, avec toujours le point commun de me plonger dans une confiance absolue envers la vie. Je ne me valide pas mes quinze ans de danse consciente à attendre le mouvement « juste », à voir passer tous les mouvements de surface, d’identification, de fausses croyances, d’émotions, puis à laisser être le vrai en moi, dans mon corps, dans chacun de mes gestes, m’ont fait grandir en conscience.

En focusing, on appelle ce voyage au sein de nos différentes couches intérieures « l’holo-mouvement ». Je ne l’appelais pas comme ça avant mais je le pratiquais, depuis quinze ans. Je le pratique depuis quinze ans. J’ai vu les innombrables pièges que me tend mon égo pour m’éviter de sentir ce qui est vrai en moi. J’ai vu, et bien souvent pris, tous les chemins de traverse qu’il me tendait. Après probablement des milliers d’heures à faire cela, je connais le bouton maintenant. Je l’ai trouvé. Je sens sur commande désormais où ma conscience se situe, d’où vient le mouvement qui me traverse. Alors quand j’entends des heures de conversation sur « c’est quoi cet holo-mouvement », « quels sont les différents niveaux qui l’habitent », « mais est-ce qu’on peut pas s’égarer là-dedans », « comment je reconnais si c’est un mouvement vrai ou si c’est mon mental qui me raconte des choses » et « la présence c’est quoi » en étant en position d’apprenante, hé bien je m’ennuie, profondément. Tout ce que j’ai envie de partager de mon expérience, de mon exploration, de mes égarements, des subtilités de ma psyché de j’ai découvertes, des plans tordus de l’égo pour nous maintenir dans son tout petit monde, ne peut pas s’offrir car je ne suis pas en position d’enseignante. Je suis censée être apprenante, de chose que je sais déjà.

Et là où je suis, cette formation, ne me porte pas plus haut, pas dans les échanges en groupe. Elle m’apprend à accompagner les personnes en séances individuelles. A travers chaque pratique de l’ACP et du focusing à deux ou trois, elle me permet de poursuivre mon chemin intérieur, de grandir en conscience, de me défaire encore de fausses croyances, de traumas.

Mais en groupe, elle ne m’apprend presque plus rien.

A part cela : Il est temps que JE ME VALIDE dans ma position d’ENSEIGNANTE de la conscience, de la désidentification, de l’Amour.  

Et il est temps que je valide que je peux continuer à grandir en conscience, sans souffrir, dans la joie, la beauté et l’harmonie.

Alors… Pourquoi cet article s’appelle « Ma responsabilité » ? Hé bien, parce que dès lors que j’ai vu en moi le reflet exacte de ce que je croyais n’exister qu’à l’extérieur de moi, il m’est apparu comme une évidence que cette formation était absolument parfaite pour moi, exactement telle qu’elle est. C’est le cadre dont j’avais exactement besoin pour identifier et transformer ce qui me freinait à l’intérieur de moi. A partir de ce point de vue, je n’arrive plus à voir qu’il y a des problèmes dans cette formation. Je vois toujours le nivellement par le bas et l’inconfort du lieu, mais je reconnais que cela est parfait, que sans cela, je n’aurais pas grandi en conscience là où j’avais besoin de grandir, je n’aurais pas éclairé les zones en moi qui avaient besoin de lumière.

J’ai vécu de l’intérieur, en direct, qu’en prenant la pleine responsabilité de là où je suis, en annihilant (au moins pour un moment) la pensée que l’autre est responsable de quoi que ce soit qui me concerne, je me libère. J’ai tout à coup le pouvoir de transformer les choses. Tant que je suis coincée dans « c’est l’autre qui devrait faire/être autrement », je me sens victime, et tant que je me sens victime, les solutions ne m’apparaissent pas. Dès lors que je me responsabilise, les solutions m’apparaissent, et elles n’ont même pas besoin de l’autre pour s’appliquer.

Tant qu’il y aura sur Terre une personne qui ne se valide pas dans ses compétences, il y aura l’exacte contexte pour exemplifier cela. Chaque partie est indissociable de l’autre. Pour simplifier encore plus : Tant qu’il y aura une victime, il y aura un bourreau pour lui montrer qu’elle est victime. Et cela se décline à l’infini, pour les actes les plus graves.

Les bourreaux auront donc bon ton de retourner cette vérité contre leur victime en mode « c’est intéressant de voir pourquoi tu as besoin d’être dans un endroit sale. Et comme c’est intéressant, je ne suis en aucun cas responsable d’avoir choisi ce lieu pour donner mes formations »  et ainsi continuer de jouer parfaitement leur rôle… Mais attention : Le fait que l’un (la victime) ait besoin de l’autre (le bourreau), n’empêche aucun des deux de se retirer du jeu à n'importe quel moment.

Ainsi nous serons, un jour, tous libéré-e-s.

Pour ma part j’ai décidé de terminer ma formation, parce que j’apprend énormément dès qu’on pratique, parce que c’est bientôt fini et parce que j’ai besoin d’aller au bout de ce que j’ai entrepris, parce qu’aussi j’y ai rencontré des personnes magnifiques dont l’amitié et la conscience me nourrissent profondément.

Et maintenant que je ne crois plus qu’il faut souffrir pour grandir et que je me valide mon propre chemin intérieur, si ça se trouve, je vais percevoir les choses d’une toute autre manière… Prochaine session dans un mois.

Aimes-toi j’te dis !

Ou la tyrannie du développement personnel.

Janvier 2024

« Quand tu t’aimeras tu trouveras l’amour. »

« Comment veux-tu être aimée si tu ne t’aimes déjà pas toi-même?! »

 

Ca vous ai déjà arrivé d’avoir envie d’envoyer bouler la personne qui vous sort ce genre de phrase ? Moi oui, souvent. Mais pourquoi donc? Parce que : « j’y arriiive pas bordel !! ».

On peut toutes être tentées de prêcher ce genre de phrases toutes faites, sur un ton dégoulinant de bonnes intentions… celles dont l’enfer est pavée-  tant qu'on n'a pas fait le chemin. Car celle qui a fait le chemin du véritable amour de soi sait à quel point il est ardu, à quel point il peut nous laisser impuissantes devant une montagne bien trop difficile à franchir, à quel point il ne suffit pas de le vouloir, et à quel point il prend du temps! Elle connait la violence ressentie face à ces injonctions simplistes lorsqu’elles sont reçues dans un espace de non-amour de soi qui nous dépasse. Que font-elles, ces belles phrases, à part nous faire nous sentir encore plus nulles ? Bah oui, tout à coup je ne suis plus seulement nulle de ne pas réussir à être aimée, en plus, je suis nulle de ne même pas réussir à m’aimer moi-même… Vraiment, il n’y a plus rien à faire pour moi !

Asséner à quelqu’une (ou à nous-même) qui souffre « t’as qu’à t’aimer » ou toute autre formule mieux enrobée de soit-disant bienveillance, est l’exemple même du non-amour. Car qu’est-ce que l’amour ? C’est l’accueil de ce qui est. Lorsque je suis dans mes abîmes de non-amour, de quoi ai-je besoin ? D'accueil, là où je suis. Pas la où je devrais être dans le meilleur des mondes des apôtres du développement personnel. Là où je suis vraiment. Dans ma réalité présente. C’est là que j’ai besoin d’être aimée. Là que j’ai besoin de m'aimer, de m'accueillir. Le premier acte d’amour de moi est d’accueillir avec douceur ces espaces où je me déteste, où je me critique, où je me rejette. Le premier acte de non-amour est de me mettre une pression à être ailleurs, à être autre chose que ce que je suis en cet instant.

Entendre toute l’ampleur de ma détestation de moi-même et consoler cette part de moi qui souffre tant de se rejeter elle-même. L’écouter, la choyer, la laisser pleurer sur mon épaule, et lui murmurer « oui, je comprends », sont des actes d’amour de moi.

Alors, pour éviter la confusion, plutôt que de vouloir absolument s'aimer, si on s'accueillait, si on s'écoutait, exactement telle que nous sommes, là, maintenant ?

 

Comment vous êtes, vous, là maintenant ?

Être mise en boîte

Septembre 2023

Au début de l’été j’ai participé à un séminaire dans lequel j’ai eu plusieurs occasions de danser. L’une d’elle était la soirée festive du dernier jour. A un moment une chanson très aérienne et éthérée est passée et j’ai laissé mon corps y répondre en déployant mes bras, mes ailes et en m’étirant vers le ciel. Une personne le lendemain m’a dit « ahlala, quand tu danses, t’es très aérienne, j’adore ». Elle a été touchée par une danse et elle a conclu que toutes mes danses sont ainsi. Ce qui est encore plus intéressant c’est que cette personne était présente aussi lors des autres danses, celles sur des rythmes africains où je tapais des pieds par terre la colonne penchée en avant…. Bien dans la terre ! Sa généralisation n’est donc pas venue de ce qu’elle a vu, mais de ce qui a le plus retenu son attention, dans ce cas, ce qui lui a plu. C’est donc une généralisation d’une impression positive…

On m’a aussi souvent imposé un reflet de moi basé sur une généralisation négative. Des personnes qui m’ont vue pendant des jours avenante, souriante, le cœur ouvert, m’ont tout à coup catégorisée « tigre » ou  «  colérique » après un évènement qui a ouvert l'énergie de colère en moi. Ne pouvant prendre du recul sur cette énergie de colère exprimée, même pas dirigée directement contre elle-eux, leur esprit s’est focalisé dessus et a effacé tout le reste pour conclure « Mélisa est colérique ».

Comme pour la danse « aérienne », la colère a occupé, dans le temps total du lien, un tout petit bout, disons 5%. Mais l’esprit ne retient pas la vérité, il retient ce qui vient le chercher, l’animer, le cueillir. Cette personne qui a aimé ma danse aérienne vibrait avec cela et c’était bon pour elle. Alors elle l’a retenue au-dessus de tout le reste. Ces personnes qui ont fortement rejeté l’énergie de colère (non-exprimée vers elles-eux) vibrait avec cela et ce n’était pas agréable à ressentir. La personne qui complimente ma danse me parle d’elle, de ce sentiment aérien, léger qu'elle ressent facilement et qui lui fait tant de bien. La personne qui blâme l’expression de ma colère me parle d’elle, de ce sentiment brûlant dont elle ne veut/peut accepter la présence en elle.

Dans les deux cas, que la généralisation soit positive ou négative, elle est difficile à recevoir pour moi car je me sens découpée, obligée de correspondre toute entière à ce qui n’est qu’un tout petit bout de moi. J’ai un sentiment intense de frustration de NE PAS ETRE VUE POUR CE QUE JE SUIS : Changeante, complexe, incohérente, VIVANTE.

Avez-vous déjà ressenti cela ?

Que faites-vous pour éviter vous-même d’imposer de telles généralisations sur les personnes qui croisent votre chemin ? Arrivez-vous à prendre en compte toute leur complexité lorsqu’elles vous éblouissent, que ce soit de lumière ou d’ombre ? Arrivez-vous à ne pas les mettre en boîte ?

Reconnaissez-vous ce qui en vous vibre avec l’expression de ces personnes et vient animer votre propre beauté et votre propre ombre ?

Comme disait Rogers il y a soixante ans : "Une personne est un processus vivant, pas une entité fixe et statique" (Le Développement de la Personne).

Aborder une personne (ou soi-même !) à partir d'une idée figée, définitive, que l'on a sur elle c'est non seulement la réduire à infiniment moins que ce qu'elle est, mais c'est aussi l'empêcher d'évoluer.

Me tenir droite, seule

Septembre 2023

J’ai trop entendu « il faut d’abord que tu trouves ton bonheur en toi-même avant de le remettre dans les mains d’une autre personne », sous-entendu un homme. De manière assez intéressante, ces phrases venaient surtout d’amis, majoritairement des femmes mais pas que, célibataires au profil évitant. Iels étaient seul-e-s parce qu’iels ne parvenaient pas à s’ouvrir à une relation amoureuse ou pas assez durablement. Ce discours leur allait donc bien. Iels se targaient d’être heureux-se seul-e-s alors que cette pensée leur servait surtout à justifier la fermeture de leur cœur en grapillant au passage un sournois sentiment de supériorité.

 

Ce type d’affirmation est-il cependant tout à fait dénué de fondement ? Je ne pense pas.

 

Aujourd’hui je vis seule avec ma fille, comme depuis toujours, sauf une merveilleuse année pendant laquelle je me suis éveillée et couchée chaque jour aux côtés d’un homme que j’aimais (…sauf quand, ne supportant plus ses bouderies, j’allais dormir sur le canapé). La journée ma fille est au collège. Et, en tant que travailleuse indépendante, et à part pour des balades ou cafés en terrasses avec des amis, je suis seule. Souvent la journée entière. J’œuvre. Dans le silence de mon 50m², j’envoie des mails, je publie les infos sur mes activités, je monte des vidéos, ou je vais en tourner, j’écris des scripts. J’œuvre aussi pour continuer de me former à l’accompagnement thérapeutique : je lis et j’écris. En ce début septembre aux chaleurs estivales, j’écris actuellement en maillot de bain au bord de la rivière.

 

J’écris aujourd’hui parce qu’une question me taraude : que suis-je sensée ressentir ? Qu’est-ce que les gens « normaux » ressentent lorsqu’ils passent la plupart de leurs journées seul-e-s ? Est-ce qu’il n’y a que pour moi que c’est parfois si difficile ?

 

Car je dois vous avouer une chose. De toutes les activités citées plus haut, certains jours aucune ne m’attire. Je me sens si seule que rien de tout cela ne m’anime. Une douleur dans mon plexus me fait pleurer toute la journée ou presque. Il y a quelques mois, lors de ces journées, je me gavais de chocolat en regardant des séries. Maintenant je vais marcher. C’est déjà mieux. Mais j’ai toujours mal. Toujours mal de ne pas évoluer au quotidien avec un témoin de mon existence. Une âme qui reflèterait la mienne et dont je pourrais prendre soin, chaque jour. Pas de temps en temps, pas une fois par semaine. Chaque jour. Voilà ce que serait pour moi vivre en couple.

 

En l’absence de ce miroir quotidien, puis-je avancer ? Puis-je me tenir droite, toute seule ?

 

Dans la réalité d’aujourd’hui, souvent oui. Et parfois non. La réponse n’est-elle pas aussi simple que cela ? 

         

  « Souvent tu te sentiras œuvrer pour ce qui compte pour toi. Tu sentiras tes ailes s’étendre et tu t’endormiras un sourire aux lèvres de la joie d’être en vie. Puis parfois, sans raison apparente, tout te semblera insupportable. Ta solitude te sauteras à la gorge et tu ne pourras rien faire pour t’en défaire. Il te faudra seulement attendre. Car à un moment l’emprise se desserrera et comme s’il ne s’était rien passé ton cœur te semblera plus léger qu’il ne l’a jamais été. Mais ne t’attends pas à la linéarité. Car la vie humaine puise sa force de la dualité. Elle doit se déplacer dans toutes les sphères, les plus lumineuses et les plus sombres, pour garder son énergie. De temps en temps c’est dans tes ombres qu’elle va puiser. Sois-en reconnaissante car ainsi tu Vis. »

 

Oui. Ainsi je m’évite de devenir une productrice de phrases toutes faites destinées à me masquer mes insécurités. Ainsi je reste en lien avec tout ce qui fait la beauté de l’existence. Ainsi je me souviens que chaque âme souffre parfois, qu’elle vive seule ou en couple, et qu’il n’existe aucun baume éternel. Seulement la certitude que, sans effort, la lumière reviendra. Il suffit que je laisse la vie faire. Que je la laisse être ombre quand elle est ombre. Être lumière quand elle est lumière. Être bonne quand elle bonne, être douloureuse quand elle est douloureuse.

 

C’est cela que je voulais vous dire. Empêcher la tristesse, la colère, même la rage, d’être lorsqu’elles sont, c’est aussi empêcher la joie de revenir. Bloquer l’ombre, c’est bloquer la lumière. Car le mouvement de vie n’existe que dans son voyage à travers les forces opposées. Le bloquer d’un côté, c’est l’empêcher d’atteindre l’autre.

 

Dans la danse, lorsque la contraction est à son comble, elle touche un point qui la redirige vers l’expansion. Si j’arrête le mouvement au milieu de la contraction, il n’atteindra jamais l’expansion. La vraie. Celle que je ne peux forcer. Celle qui apparaît d’elle-même et me porte bien plus loin que ce que j’aurais pu imaginer.

Alors cessons de prétendre être autre chose que ce qui nous habite au présent. Au contraire, assumons-le. Accueillons-le. Aimons-le. Puis laissons-le se transformer.

Ainsi seulement, en couple ou non, je suis un être complet qui se tient droit, seul.

Ego spirituel

Samedi, en contactant la lumière, elle a colonisé mes cellules, mon corps tout entier. Elle m'a ramenée dans la matière. Dans le sexe c’est par le corps que je rejoins les étoiles, la Conscience, le Grand Vide.

J'ai vu, senti, vécu que le haut rejoint automatiquement le bas et le bas, le haut.

Tout n'est qu'une seule et même chose.

Toute entité vivante contient sa force vivante opposée. Sans elle, elle ne pourrait exister. Le sacré contient la matière et la matière le sacré.

Je suis grande et complexe

Dans l'infini simplicité 

De mon existence

Multiple et singulière

J'ai traversé le Grand Espace

Pour retourner à la matière de mon corps.

Lorsque mon esprit humain percevait "l'ici-bas" et le "là-haut", l'existence matérielle et le Sacré, comme des espaces séparés, c'est qu'il créait lui-même cette perception. 

A aucun moment ces réalités ne sont séparées.

Je fais redescendre mes perceptions, expériences mystiques, dans la normalité. J'arrête d'en faire tout un plat. J'étais dans l'égo spirituel. Je voulais que ces expériences soient valorisées. Redescendre dans la matière, c'est admettre que ces perceptions sont parties de la vie humaine, simple et normale.

La Vie pleinement, c'est sans ce fantasme de l'ailleurs. Car l’ailleurs est en réalité ici et maintenant.

Je débusque mon égo spirituel au moment où je guéris ma blessure originelle d’abandon.

Je renais. 

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